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Cake day: June 4th, 2024

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  • Un tempo de retard Peu importe la souffrance personnelle, rien ne serait pire que « le déshonneur », fait-on valoir dans l’entourage de Gabriel Attal. Mais le trouble saisit les proches du premier ministre lorsqu’ils découvrent que certains candidats ont été contactés par les équipes de l’Elysée, et parfois par le chef de l’Etat lui-même, pour leur demander de se tenir à l’écart de ce front républicain naissant. « Il y a un chemin. Tu te maintiens ? », demande Emmanuel Macron à un député sortant, prêt à se désister. « Le RN est trop haut, il va gagner quoi qu’il en soit », répond celui-ci. « Toi, tu te maintiens ou pas », insiste Emmanuel Macron, comme s’il ignorait la réponse de l’élu.

    Le président et ses proches s’interrogent : faut-il faire barrage au RN à tout prix ? Si front républicain il y a, « il faudra délimiter le périmètre », glisse Brigitte Macron. « Faites attention à ne pas créer l’effet inverse », dit-elle en imaginant mal des électeurs de droite voter pour un candidat de la gauche radicale face au RN. Depuis Marseille, l’époux de Sabrina Agresti-Roubache prévient l’Elysée : « “Sab” va se retirer. » Pas de réponse. Sans attendre, la ministre de la ville, qui a vu les bureaux de vote les plus bourgeois choisir massivement le RN, annonce son désistement devant les caméras. « Ma “Sab”, je suis dégoûté de te perdre… Tu as pris la bonne décision », lui glisse Gabriel Attal au téléphone. « That’s life. Il faut revenir à nos fondamentaux pour ne pas se perdre, je veux me regarder dans le miroir », répond-elle. Emmanuel Macron ne l’appellera que bien plus tard, après que cette proche du couple présidentiel a reçu les félicitations de trois ministres.

    Autour de la table de l’Elysée, les hommes du président s’efforcent de lire dans les pensées de ce chef qu’ils ont adulé. François Patriat, toujours indulgent, juge qu’il lui sera moins douloureux de nommer Bardella à Matignon que de donner les clés à Marine Le Pen en 2027. Peut-être parce qu’il pourrait, en cohabitation, « appuyer sur le bouton pour le mettre dehors et rester le maître des horloges ». Maîtriser le temps, une illusion tant cette campagne express s’est jouée avec un tempo de retard. Elle devait pourtant prendre tout le monde de court. Quand, le 9 juin au soir, Emmanuel Macron aborde avec des proches les dates de ces élections anticipées, il espère qu’une campagne de trois semaines lui donnera l’avantage. « Le 7 juillet, les blédards seront partis et ne voteront pas LFI », lâche Gérald Darmanin, en petit comité, l’esprit déjà tourné vers sa circonscription de Tourcoing (Nord) – des propos que le ministre de l’intérieur dément.

    « Il fallait dépressuriser », martèle-t-on dans l’entourage présidentiel, pour décrire l’état d’esprit d’Emmanuel Macron face au mécontentement populaire. Le fidèle de la première heure, Alexis Kohler, juge que la coupe est pleine. Et envisage bel et bien, cette fois, de quitter l’Elysée – interrogé, l’intéressé ne commente pas. Le haut fonctionnaire défend jusqu’au bout l’idée de cette dissolution périlleuse, y compris si le scrutin propulse le RN à Matignon. « Le président peut se sacrifier pour éviter la victoire de Marine Le Pen en 2027 », dit-il en substance autour de lui. « Cohabitation vaut mieux que succession », glisse aussi Richard Ferrand à un député de l’aile gauche, laissant entendre que donner au RN les clés du camion sans essence mènera les lepénistes dans le mur.

    Valse-hésitation Passé la sidération, le scénario d’un gouvernement dominé par l’extrême droite n’effraie plus autant la garde rapprochée du président. « Ce n’est pas lui qui mettrait le RN au pouvoir, ce sont les Français. Lui, il a prévenu qu’il peut y avoir la guerre civile, ensuite les Français font ce qu’ils veulent ! », relaie François Patriat. « Si le RN montre en deux ans qu’il est parfaitement incapable de gouverner, on peut espérer qu’il n’ira pas plus loin », rapporte le père du chef de l’Etat, Jean-Michel Macron, dans un entretien au Dauphiné libéré, le 3 juillet, en ajoutant que c’est « un peu ce que [son] fils [lui] avait dit deux mois avant les élections européennes ».

    Avant de se décider à dissoudre, Emmanuel Macron maugréait contre une Assemblée nationale qu’il jugeait « ingouvernable » depuis juin 2022. Récolter une Chambre plus instable encore, au risque de frôler la crise de régime le 7 juillet, signerait son échec. « Quoi qu’il arrive, il faudra une majorité à cette Chambre, nous verrons les proportions. Nommer Bardella aurait une logique institutionnelle », décrypte un conseiller de l’Elysée.

    La valse-hésitation élyséenne ulcère une partie des troupes macronistes. « On va avoir le choix dimanche entre les héritiers de Vichy et la IVe République », tance, sur RTL le 3 juillet, Clément Beaune, ancien sherpa d’Emmanuel Macron, affirmant sa préférence nette pour la deuxième option. A l’approche du second tour, les partisans du front républicain reprennent espoir. Les désistements massifs, tant du côté du camp présidentiel qu’à gauche, pourraient faire effet.

    D’heure en heure les sondages évoluent, éloignant la probabilité d’une majorité absolue offerte à l’extrême droite. L’équipe de campagne de Gabriel Attal n’ose y croire, tandis que le RN, lesté par les profils racistes, antisémites et parfois criminels de dizaines de ses candidats, lance ses dernières forces dans la bataille. Pendant ce temps, l’animateur star de la chaîne réactionnaire CNews Pascal Praud raille les « tripatouillages et magouillages » des partis adversaires au RN, en écho à Jordan Bardella et Marine Le Pen, et à l’extrême droite prompte à associer le front républicain à un « vol » de l’élection


  • Le buffet est installé sur la terrasse de l’Elysée. Ce dimanche 30 juin, la soirée est fraîche pour un été naissant. Un frisson parcourt la quinzaine de convives, tous des hommes, réunis autour d’Emmanuel Macron pour suivre les résultats du premier tour des élections législatives. La vague populiste qui a submergé le pays lors des européennes s’est transformée en tsunami. L’extrême droite a séduit plus de 10 millions d’électeurs. « Ce n’est pas un vote de colère, c’est un vote d’adhésion », analyse le chef de l’Etat. Le « peuple », à qui il voulait redonner la parole, amplifie le message envoyé le 9 juin. Voilà plusieurs jours déjà que le président de la République sait qu’il lui sera impossible de rafler une majorité solide, comme il l’imaginait.

    Cette dissolution qu’il présentait, le 24 juin, au micro du podcast « Génération Do It Yourself » comme un geste de « confiance » envers les Français, fustigeant « le système qui pense que les gens sont idiots », vire au naufrage du camp présidentiel. Le Rassemblement national (RN) peut remporter la majorité absolue. « Il faut se préparer », prévient le sénateur de Côte-d’Or, François Patriat, assis autour de la table. Le chef de l’Etat laisse entendre qu’il pourra « gérer ».

    A 20 h 01, le bref communiqué de l’Elysée est diffusé auprès des rédactions. « L’heure est à un large rassemblement clairement démocrate et républicain pour le second tour », énonce le président, laissant planer une ambiguïté sur le soutien apporté au Nouveau Front populaire (NFP) pour battre le RN. Ira-t-il jusqu’à appeler à voter pour des candidats « insoumis » afin de faire barrage à l’extrême droite ? Mystère.

    « Ça dégaze trop à Matignon » Le jambon, les fromages et le vin rouge disparaissent peu à peu. Les résultats circonscription par circonscription s’égrainent au fil d’une nuit qui s’étire. Brigitte Macron passe une tête. « Celui-là, je l’aime bien », commente la première dame au nom d’un candidat, compatissant à l’annonce de l’échec d’un autre. Il est minuit tout juste quand, oubliant le pays sous le choc, on sort le champagne. C’est l’anniversaire de Richard Ferrand, 62 ans. François Patriat dépose un baiser sur le crâne de l’ancien président de l’Assemblée nationale. On rit. Ce dernier, froissé du sort réservé à son ami Gilles Le Gendre, que le parti macroniste a refusé d’investir à Paris, se déride. Le Breton pardonne même cette folle dissolution à Emmanuel Macron. Comme d’autres, il s’est fait une raison.

    Depuis la rive gauche de la Seine, on refuse de baisser les armes. Gabriel Attal, aidé de ses communicants, tâche depuis le 9 juin de se sculpter une stature de valeureux combattant de l’extrême droite. Le chef de gouvernement, ancien socialiste, refuse l’idée d’une passation de pouvoir avec le leader lepéniste Jordan Bardella, qui entacherait son destin politique. Après avoir bataillé contre « les extrêmes », plaçant sur le même plan le RN et LFI, le trentenaire fait valoir que l’alliance de gauche n’a plus aucune chance de décrocher la majorité. La menace existentielle pesant sur la République se concentre désormais sur le parti fondé par Jean-Marie Le Pen. Peu avant 22 heures, le premier ministre porte le fer contre son ennemi numéro un. « Notre objectif est clair : empêcher le RN d’avoir une majorité absolue au second tour », tonne Gabriel Attal depuis le perron de Matignon, appelant tous les candidats de son camp arrivés en troisième position à se désister pour déjouer la victoire de l’extrême droite.

    Le coup est parti. Emmanuel Macron n’a pas regardé la déclaration de son premier ministre. Aucune télévision n’a été allumée près de lui. A quoi bon ? Les deux hommes sont en froid glacial depuis la dissolution. Gabriel Attal, convié à l’Elysée ce soir-là, n’y mettra pas les pieds. Depuis cette dissolution incomprise, les deux têtes de l’exécutif ne se parlent plus guère, sauf « nécessité de service ». Mais le chef de l’Etat connaît la position de son premier ministre qui, par le biais de son directeur de cabinet, Emmanuel Moulin, a prévenu le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler. « Attal a mis le président devant le fait accompli », veut croire l’aile droite du gouvernement, où Bruno Le Maire, Gérald Darmanin, Aurore Bergé défendent le « ni RN-ni LFI » au second tour. Une volte-face confirmée au sein du cercle masculin qui dînait à l’Elysée. Gabriel Attal martèle son « combat » contre l’extrême droite, rappelant le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie consubstantiels au RN. « Ça dégaze trop à Matignon », peste Emmanuel Macron, agacé de voir son premier ministre accaparer les médias.

    Jusqu’au mardi 18 heures, heure limite de dépôt des candidatures pour le second tour, une course contre la montre s’enclenche. Depuis le QG de campagne, rue du Rocher, à Paris, les équipes « attalistes » appellent, un à un, les députés qualifiés dans des triangulaires risquées pour les prier, parfois fermement, de se désister. Certains acceptent sans broncher. D’autres refusent, se braquent ou fondent en larmes. « Le désistement, c’est un processus difficile quand on est engagé la tête dans le guidon et qu’on a accroché la qualification, c’est très douloureux », compatit la députée Renaissance sortante Olga Givernet, arrivée en tête dans sa circonscription de l’Ain.

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  • Le pire c’est son regard mort qui s’éteint en regardant vers le bas, vers le néant, il se dit sûrement que si il ne regarde plus son interlocuteur alors il n’existe plus, il est caché, lepéniste perché tu peux pas me toucher. Dans ce bref intervalle de lucidité il a vécu une projection astrale et a réalisé qu’il n’avait rien à foutre là, que c’était un imposteur au service du chaos et qu’il était décidément dans le camp des mauvais.

    Puis le journaliste, maître du temps, lui tend une perche pour à nouveau réintégrer son costume mal ajusté, afin que le carnaval puisse continuer et qu’il puisse reprendre sa litanie orwelliene avec une diction hésitante.